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Bordeaux Cercle Lecture & Clinique 2020 : Hamlet, la tragédie du désir – en visioconférence
22 mars 2021 - 20 h 15 min - 22 h 15 min
Bordeaux Cercle Lecture&Clinique 2020 : « Hamlet, la tragédie du désir »
Nous proposons deux rencontres mensuelles où s’alternent :
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Une ou deux constructions de cas pour une clinique de l’acte orientée par le réel, à partir des propositions des participants.
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Une expérience de lecture littérale dans un dépliage précis des textes
Pour articuler la question du désir et du phallus, il nous a paru important suite à
notre dernière rencontre, de reprendre la lecture du graphe du désir que nous
propose Lacan dans ce séminaire de 1959 et dans « Subversion du sujet et
dialectique du désir dans l’inconscient freudien » 1960, dans les Ecrits. M. Mesclier
proposera un commentaire.
Et toujours à partir de cette question du phallus, Stéphanie Marini présentera une
problématique clinique.
Calendrier deuxième semestre : 12, 19 avril ; 03, 17 mai ; 14, 28 juin.
Lieu ouvert, présence régulière souhaitée
Période : Septembre 2020 – Juin 2021
Dates et Heures : lundi soir de 20h15 – 22h15.
Fréquence des rencontres : Deux rencontres mensuelles
via Skype
Contact : briolais.florence@orange.fr tel : 06 82 03 97 55
Vous trouverez ci-dessous le retour d’une expérience en Visioconférence, des rencontres du Cercle Lecture&Clinique durant la période de confinement.
Retour d’une expérience en Visioconférence, des rencontres du Cercle Lecture&Clinique durant la période de confinement.
Au départ il n’était pas du tout probant de nous retrouver en visioconférence, et ce ne fut qu’après quelques semaines de silence que s’imposa le désir de se rencontrer pour échanger sur nos expériences de confinés et poursuivre un travail clinique et de lecture du séminaire sur le désir.
Lors de notre première rencontre clinique, malgré nos difficultés de néophytes à échanger en visioconférence, il y avait une urgence à dire un insupportable dans notre activité professionnelle entrelacée au quotidien.
Les échanges furent vifs, traduisant la tension suscitée par le contexte. Les témoignages d’exigence excessives et incohérentes des instituions « parce qu’il fallait que ça continue » ne manquaient pas, venant déstabiliser le professionnel en mettant à mal son souci déontologique, éthique dans sa pratique. Comment ne pas écraser la demande du patient par l’exigence comptable de l’institution ? Une visio-consultation avec un enfant, un adolescent, un adulte, sur le lieu familial était-elle réellement -possible, souhaitable ? Et le regard et la voix venant faire intrusion dans l’univers du quotidien des patients soulevait au cas par cas bien des questions. Quelle garantie pour le « secret » ? Quels effets de la proximité des « signifiants vivants » que sont les parents pour un enfant ? Fait notable, cette pratique de la visioconférence ou téléconsultation permit des possibilités d’échanges avec certaines familles de jeunes patients, restées jusque-là inaccessibles.
Un des participant signifia son inaptitude à travailler dans de telle condition, dénonçant l’impossibilité à s’adapter à une telle pratique avec ses patients, mais aussi en tant que participant à notre rencontre.
Façonner le monde avec le numérique n’est pas sans conséquence sur l’humain et cette virtualisation n’a- t- elle pas des répercussions sur la pratique psychanalytique ? La voix, le regard à travers cette machine numérique et donc non analogique, est très artificielle, procédant à une sorte d’illusion. Est-ce que cela ne vient pas mettre à l’épreuve, tant le patient que l’analyste non en présence et de ce fait la dynamique transférentielle, la cure ?
Cette situation exceptionnelle convoquait chaque professionnel « connecté » à son patient à innover dans sa pratique. Il s’agissait de créer un cadre compatible avec l’association libre, laissant au patient le soin de s’aménager un espace-temps le plus adéquate, translation de cet espace-temps habituel du cabinet du psychanalyste vers un lieu autre sans la présence en-corps du praticien (cabane de jardin, cave, voiture, coin de nature). Mais également de maintenir les conditions de l’acte analytique par une attention particulière aux inflexions de la voix, au silence trop « vide » pour certains « Vous êtes toujours là ? ».
Dans la continuité de la première plénière en visioconférence du Pari de Lacan, la réflexion de Pierre Bruno sur la présence du psychanalyste qui procède d’une marque et d’une adresse, est précieuse. Elle nous donne matière à poursuivre sur cette question, et nous l’en remercions. 3
Chaque participant ayant pris le temps de témoigner, cette première rencontre fut très longue. Chacun « repartit » assez éprouvé mais dans une exigence redoublée vis-à-vis de ce travail que nous engagions dans ces visioconférences.
Nous décidâmes pour la suite de revenir à l’amplitude horaire habituelle, et de resserrer notre travail clinique, sur cette question de la présence, du jeu transférentiel en fonction des objet (voix, regard).
Deux problématiques cliniques furent présentées : celle d’un enfant pour lequel le contexte anxiogène amplifiait sa persécution par le regard de l’Autre. Une autre problématique toujours en lien avec le contexte témoignait du traitement dans le jeu des enfants des contraintes imposées par le réel de cette pandémie. Par exemple le jeu de « touche-touche » devenait un jeu de « pas touche ». Certains professionnels relevant la pertinence des initiatives des enfants s’en inspirèrent.
Suite à notre deuxième rencontre clinique, la liberté des échanges et la richesse des élaborations nous conduisirent à poursuivre notre expérience en visioconférence pour tenter cette fois, de reprendre notre lecture du séminaire sur le désir et son interprétation, corrélée bien-sûr à la tragédie d’Hamlet. Cette tentative exigea plus de vigilance encore, quant à la prise de parole et l’écoute de chacun.
Hamlet, ce héros moderne, avisé par le Ghost, « sait », avant même de commettre son acte, ce qui le distingue d’Œdipe ; et dont l’attitude de faire le fou avec les autres a une portée politique.
Il s’agissait cette fois, lors de notre rencontre, d’approcher « L’objet Ophélie ». Ophélie, élément d’articulation essentiel dans le cheminement d’Hamlet vers son destin mortel et l’acte qu’il accomplit en quelque sorte malgré lui.
Ophélie image de la fécondité vitale, Ophélie phallus, omphalos, objet d’exaltation suprême, et porteuse d’une interrogation sur le secret du désir. Une série de phases contrastées scandent les rapports entre les deux amants que Lacan déclinera selon les trois temps de la relation à l’objet.
Le premier temps est celui de la vacillation face à l’objet du fantasme où les limites entre le sujet et l’objet devenant incertaines, le sujet traverse une expérience de dépersonnalisation. Ce sera le désordre dans la tenue d’Hamlet, ses propos décousus, son incohérente agitation qui font s’écrier Polonius : « C’est l’amour ! » alors que cet état pathologique est ce qui s’en éloigne le plus. L’Unheinliche, ici rencontré par Hamlet, dissout Ophélie comme objet d’amour : « I did love you once ! ». Sarcasme jeté au visage de la jeune fille diffamée dans sa puissance d’enfantement.
Ainsi se révèle le second temps de la relation d’objet, dès lors qu’Ophélie, identifiée comme phallus, subit le rejet intégral de ce symbole signifiant de la vie. Lacan souligne une mutation du fantasme, par laquelle l’objet a devient un objet phallique repoussé par l’odieuse attitude d’Hamlet, à l’encontre de celle qu’il sût un moment séduire.
Le troisième temps enfin qui marque la réintégration fantasmatique de l’objet a. Lorsque Hamlet excédé par les lamentations de Laërte, saute dans la tombe pour l’empoigner et, par cet acte, s’identifiant au deuil de ce frère aimant, retrouve dans la perte son propre objet d’amour. A cet instant, nous dit Lacan, la boucle se referme sur ce héros tragique qui ne pourra qu’accomplir son destin.
L’objet a, est dans ce séminaire VI objet du désir en tant que terme du fantasme. Il prend la place de ce dont le sujet est privé symboliquement : le phallus. Cette première approche de l’objet qui le maintien dans le cadre narcissique du fantasme, est très loin d’épuiser tout l’empan de cette invention majeure de Lacan. En septembre nous poursuivrons notre travail sur cette tragédie Shakespearienne analysée par Lacan.
Notre première rencontre est née du désir d’échange qui s’est imposé après plusieurs semaines de silence. Cela n’a pu se réaliser qu’en surmontant nos résistances à utiliser la voie numérique. Nous n’avions aucune certitude que cela marche et à chaque rencontre se reposait la question de poursuivre. Poursuite qui fut finalement toujours réitérée.
Nous avons pu constater au fil de nos rencontres que nous nous sentions plus à l’aise avec cette pratique de visioconférence, quoique… Aussi critiquable soit-elle, elle nous permit de renouer un lien de travail et de le poursuivre malgré les difficultés que nous traversions.
Pour le Cercle Lecture&Clinique
Florence Briolais
25/07/20
3« La voix peut être contrefaite mais pas l’écriture du poème… pour la voix et le regard la perception est une construction complexe dans laquelle les processus physiologiques sont commandés par la scène signifiante, mais en l’appliquant à l’écriture précisément du poème (marque du poète) … La présence du psychanalyste relève de cette marque, autrement dit, non seulement elle implique qu’elle soit sortie de l’anonymat par une adresse, mais qu’elle permette à l’analysant d’identifier une marque. » Pierre Bruno dans la suite de la 1er plénière en visioconférence.